Etienne Psaume naquit à Commercy, le 21 février 1769. Son père était tanneur. A tort ou à raison, il se disait l’arrière-petit-neveu de l’évêque de Verdun, Nicolas Psaume, né en 1518 à Chaumont sur Aire.
Si le grand-oncle était un diplomate habile, il apparaît tout de suite que le petit-neveu fut exactement le contraire. L’un était souple, l’autre était bourru et doté d’un caractère irascible.
Etienne Psaume embrassa d’abord la carrière ecclésiastique. Il reçut les ordres mineurs, mais alors commença la Révolution. Le jeune clerc changea sa voie et se prit de passion pour les idées nouvelles. Il quitta le collège sans avoir jamais été prêtre ; ses familiers ne l’appelleront pas moins : l’abbé Psaume.
Au 10 août, Psaume était à l’assaut des Tuileries ou du moins il le prétendit. Il avait quelque facilité de plume et il se crut un écrivain puissant ; à la fin de 1792, il écrivit son premier pamphlet : Réponse aux objections des royalistes contre la possibilité de la République en France. Devant le succès très relatif de son œuvre, il revint à Commercy.
Psaume arrivait en apôtre de la foi nouvelle ; il apportait à ses compatriotes la bonne parole des clubs parisiens. S’il rallia quelques agités ou quelques craintifs, il n’en devint pas plus populaire et il s’en aperçut bien vite.
Dans les mois qui suivirent, Psaume continua à s’agiter. Il fonda un club qu’il appela « la Société Montagnarde ». Il fut nommé procureur-syndic mais face à l’hostilité de certains de ses compatriotes, il cessa de s’occuper des affaires publiques.
Il épousa au petit village de Boucq la fille d’un vigneron aisé. La jeune Mme Psaume apportait en dot à son mari, une ferme à Boucq et quelques vignes. De cette union naquit trois filles.
Dans ce mariage, Psaume avait trouvé le bonheur ; celui-ci ne devait pas être de très longue durée, Mme Psaume mourut dans l’été de 1801, à l’age de 34 ans. Inconsolable, Psaume ne put plus supporter la vie de Commercy où il avait été si heureux, il vint à Nancy et il fonda un journal : le Journal de la Cour d’Appel de la Meurthe de la Meuse et des Vosges. Bien que ce journal ne s’occupait pas de politique, sa publication fut interdite. Peut-être la personnalité de Psaume y fut-elle pour quelque chose.
Psaume retourna à Commercy où il se remaria avec Jeanne Lemassu qui avait vingt ans alors qu’il en avait déjà quarante. Une fille naquit puis Jeanne quitta son mari pour se réfugier chez un certain Cabouat.
Dégoûté à la fois des femmes et de la politique, Psaume ne cherche plus de consolations que dans l’étude et l’écriture. Son œuvre principale, qui n’est point sans mérite, est le Dictionnaire bibliographique ou Nouveau Manuel du libraire et de l’amateur de livres. Ce dictionnaire est un travail d’érudition, l’effort incontestable d’un homme intelligent et instruit.
Il quitte Commercy pour retourner à Nancy. Le Journal de la Meurthe, qui traverse une crise, fait appel à lui. Il ne faillit pas à sa tâche et il releva le journal. Il écrit et polémique dans un style caustique qui amuse un public peu habitué à ces joutes de plumes. Mais les méfiances du pouvoir se sont éveillées, Psaume doit quitter le journal dont il a fait le succès.
Psaume quitte une fois de plus Nancy et revient à Commercy. Sa fille ainée a épousé Charles Simon, marchand de bois et de vin à Sorcy-Saint-Martin. Quant à la fille du second mariage, Elisa, elle donne à son père bien du souci, elle a hérité de sa mère un tempérament ardent.
Un nouveau coup frappa Psaume, sa fille ainée meurt en mai 1824. Elle ne faisait pas très bon ménage avec son mari et sentant sa fin prochaine, elle avait légué à son père l’usufruit de toute la quotité disponible et le charge de veiller à l’éducation de ses trois enfants. Le gendre, Simon, avait été lésé dans ses intérêts et profondément blessé dans son amour-propre. La brouille survint dans la famille. Trois incendies éclatent en deux jours de façon inexplicable dans la maison de Psaume. Que l’incendie fût volontaire, il était difficile d’en douter. Mais qui était le criminel ?
Les uns soupçonnèrent Psaume lui-même, les autres sa fille Elisa. Psaume connut toutes ces rumeurs, il publia un pamphlet où il montra que son ardeur combative n’avait pas vieilli.
Le temps passe, Elisa a maintenant dix-huit ans. Son père voudrait bien la marier. Mais la mère séparée, Jeanne Lemoussu, a l’idée de marier sa fille avec Adolphe, le fils aîné de son amant. A cette singulière proposition, Psaume s’indigna puis se calma et accepta ce mariage qui devait avoir lieu le 27 mai.1828. Mais quand il arriva à Pierrefite, il n’y avait plus personne, le mariage avait eu lieu le 22 mai et les jeunes époux étaient partis.
L’été se passa tranquillement. Psaume partit pour Boucq faire sa vendange.
Le 22 octobre, dans une rue du village, il rencontra son ex-gendre Simon. Les deux hommes se jetèrent un regard haineux. Le lendemain, dans le pressoir, ils échangèrent injures et menaces. Simon était accompagné d’un grand jeune homme que Psaume ne connaissait pas.
Le 26 octobre, la vendange était terminée et le vin soutiré. Il fallait le conduire à Commercy.
Le 27 octobre, le vin est chargé sur la voiture. Psaume, pressé d’arriver, part en avant, il prendra le sentier de traverse, la voiture suivra un chemin plus long mais plus facile.
On ne devait plus le revoir. Quand, vers midi, le voiturier arriva à Commercy, Psaume n’était pas là. On l’attendit vainement, l’absence de Psaume qui se prolongeait devenait inquiétante.
Simon multiplie les démarches pour retrouver le beau-père avec lequel il était si mal. Cabouat est arrivé de Pierrefite, comme les autres il ne trouve pas trace de Psaume. Tout fait penser maintenant qu’il lui est arrivé un malheur.
Le 15 novembre, le procureur de St Mihiel et le juge d’instruction font mettre en ligne tous les habitants de Troussey et de Pagny sur Meuse. On va parcourir la forêt du sud au nord, on fouillera chaque cépée.
Vers le milieu du jour, dans un taillis, à 3 mètres du chemin de Boucq à Aulnois, l’on aperçoit une masse sombre. C’était le cadavre de Psaume, il paraissait avoir été traîné par les pieds depuis le chemin où, sans aucun doute, il avait été assailli, assassiné.
Simon et Cabouat sont emprisonnés. On les accuse d’avoir tué leur beau-père, sûrement par vengeance, peut-être aussi par intérêt. L’instruction se poursuit à St Mihiel, il ne fallait pas aux magistrats énormément de perspicacité pour supposer que ce jeune homme qui accompagnait Simon pouvait bien être Cabouat, l’autre gendre de Psaume. Les charges relevées contre Simon et Cabouat paraissent accablantes et, malgré leurs dénégations, ils sont renvoyés devant la Cour d’assises de la Meuse sous l’accusation d’assassinat. L’affaire est fixée au 8 juillet, les débats vont durer quatre jours. Elle est devenue maintenant une affaire sensationnelle, elle a dépassé les bornes de la province, la presse parisienne s’en est emparée et la France entière s’intéresse à l’assassinat du « père Psaume ».